Quel loisir pour les allocataires du RMI ?
L'arbitrage consommation/loisir revisitée


Muriel Pucci*, DREES
Hélène Zajdela, Université d'Evry-Val d'Essonne et MATISSE


Résumé. Cet article propose de remettre en cause la pertinence des analyses en termes de trappes à inactivité. Pour ce faire, nous proposons de modifier le modèle habituel d'offre de travail de deux manières : en introduisant un niveau de consommation de survie et en supposant qu'il existe deux types de "loisirs". Nous considérons en effet qu'une des lacunes du modèle standard est que le "loisir" n'est défini que comme un solde. Or, le temps non travaillé peut être consacré à différentes activités. Nous distinguerons l'oisiveté du véritable loisir, en considérant l'oisiveté comme un bien inférieur. Dans un modèle d'offre de travail ainsi amendé, l'offre de travail dépend des possibilités d'occupation du temps libre. Les allocataires du RMI ayant juste accès à la consommation de survie et n'ayant pas accès au "bon" loisir : leur offre de travail est inélastique au salaire. En revanche, pour ceux qui ont un emploi qui leur permet de sortir du dispositif, l'offre de travail diminue avec le salaire. On retrouve le modèle standard comme cas particulier.
Mots clés : Trappes à inactivité, arbitrage consommation/loisir, RMI.

Abstract. In this paper, we build a renewed labor supply model in order to explain why the RMI recipients don't "fall in poverty traps" but on the contrary accept to work even for low wages. The standard consumption-leisure trade-off is extended : we consider that one needs a minimum consuption level that the non-working time can be either leisure time or to idle time. In the standard labor supply model, leisure which enters in the utility function, is implicitely defined as the non-working time. This is regrettable since this period of time is not entierely dedicated to pleasant activities. One can "do nothing" : this "non activity" can be modeled as an inferior good. In this "consumption-leisure-idle time" trad-off, labor supply depends on how much the worker can consume over the survival level and on what he does during non-working time. RMI recipients' consumption is close to the survival level and they have not much to spend on leisure : labor supply is inelastic to wage and there are no traps.
Keywords : Unemployment and poverty traps, consumption/leisure trade-off, RMI.

JEL Classification : D11, I31, J22.

*DREES, Ministère des Affaires Sociales du Travail et de la Solidarité, Ministère de la Santé, de la Famille et des Personnes Handicapées, 11 Place des 5 martyres du Lycée Buffon, 75014 Paris.